Beate
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Message: (p9169)
Posté le: 12. Nov 2004, 15:45
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Bonjour Zeina !
C'est vrai que chacun réagit différemment à la défreination - mais globalement, on peut quand-même dire que cela correspond à un "ralentissement" général, autant physique que cérébral !
Les premières semaines, on ne s'en rend pas trop compte (surtout si on prend du Cynomel, qu'on peut prendre jusqu'à 15 jours avant la cure et qui évite de tomber trop vite en hypo, il "dope" même légèrement) - mais les 15 derniers jours, on le sent vraiment ! On met beaucoup de temps pour les actes les plus anodins, on reflêchit à vitesse réduite, on oublie "tout" (ce qu'on a fait il y a 5 minutes, où on a posé un objet ...)
C'est vrai que j'ai toujours pu travailler jusqu'à 8 jours avant - mais c'est un travail de bureau, et je mettais deux fois plus de temps et devais faire d'énormes efforts pour me concentrer, du genre "tu vas à la photocopieuse, tu n'oublies PAS le papier sur le bureau, tu le mets sur la glace, tu appuies sur le bouton, tu n'oublies PAS de reprendre le papier ..." - j'étais aussi la reine du post-it, j'en collais absolument partout ! Donc, cela dépend vraiment du boulot qu'on fait - je n'aurais pas voulu être prof et faire cours à une classe d'ados turbulents dans cet état, ou alors conductrice d'engin, pilote ... (j'ai récemment correspondu avec un chauffeur de taxi qui me disait qu'il lui était absolument impossible d'arrêter de travailler jusqu'au jour de la cure, cela m'a vraiment fait peur ...)
Côté voiture, c'est vrai qu'il vaut mieux éviter au maximum, au moins à la fin, car nos réactions sont vraiment ralenties ! Il m'arrivait parfois de me retrouver quelque part sans avoir voulu y aller et sans me rappeler comment j'y étais arrivée, vraiment "dans le brouillard", ca fout la trouille quand-même (pour nous ET pour les autres !) Tant qu'il n'arrive rien d'imprévu, et qu'on ne fait que les trajets routiniers, ca pourra passer, mais on ne sait jamais ce qui peut arriver ... (et à l'hôpital, on m'a bien dit qu'il était interdit de conduire en hypo et que l'assurance, si elle le savait, ne payerait pas ...)
Pour ce qui concerne les activités, c'est à chacun de le sentir - et cela dépend énormement de la manière de vivre quand on n'est PAS en hypo ! Si on a toujours été sportif, on pourra continuer (à rythme réduit, bien sûr), car sinon, ca nous manquera et on ne se sentira pas bien dans sa peau - mais il faut être attentif à notre fatigue, ne pas nous surmener ! J'ai continué le vélo (mais en allant moins loin, pour pouvoir revenir facilement, et je me suis acheté un portable pour pouvoir appeler à la rescousse si je devais tomber en panne d'énergie ...), du roller, la gym en salle, juste pour continuer à bouger, mais il ne faut vraiment pas regarder côté performances, juste se dire que c'est toujours "mieux que rien" !
Si on ne fait pas de sport, bien sûr ce n'est pas le moment de s'y mettre ! Et de manière générale, cette période de défreination est le moment de s'écouter et de se FAIRE écouter, de dire STOP à tout ce qu'on ne veut ou ne peut pas faire - il faut essayer de se ménager, autant le corps que la tête, éviter tout ce qui peut nous stresser, les gens stressants, les activités dont on n'a pas envie ... On a tendance à déprimer facilement (résultat du manque d'hormones, ca console de le savoir, même si ca n'aide pas vraiment !), donc essayer de se faire PLAISIR : aller au cinéma, au restaurant plutôt que de faire les courses et de cuisiner, s'acheter un beau pull bien douillet (on devient très frileux), bouquiner, prendre un bon bain parfumé ... expliquer à l'entourage que l'hypo, c'est comme un ours qui hiberne, que le manque d'hormones met le corps au ralenti (température qui baisse, coeur qui bat plus lentement, digestion qui se ralentit, emmagasinement de réserves de graisse (faire donc attention !) ... ) et leur faire comprendre qu'on est moins efficace qu'avant, accepter de se faire aider (c'est le moment - mes trois filles ados ont fait de sacrés progrès, depuis ma maladie !)
Voilà pour mon expérience perso ... j'ai passé trois étés consécutifs en hypo, et je pense que de l'extérieur, peu de gens s'en sont vraiment rendus compte, puisque je continuais à "assurer" pas trop mal, mais bon, à l'intérieur, je ne me sentais pas très fringante quand-même ! Je n'aime vraiment pas cet état de "somnolence permanente", cette tristesse, ce ramollissement, car je suis habituellement plutôt du genre dynamique. Mais cela m'a obligée à ralentir et à m'écouter, ce qui n'est pas forcément un mal !
Donc, voilà, n'en aie pas trop peur à l'avance ! Je me rappèle que dans le forum allemand que j'avais découvert au début de ma maladie (j'ai créé celui-ci deux mois après ma première défreination), quelqu'un, croyant bien faire, m'avait dit : "ben, toi aussi, en hypo, tu ressembleras à une "bonne-femme Michelin", mais t'en fais pas, ca ne dure pas longtemps !" et j'avais été horrifiée ! Et je me suis alors dit que non, que j'allais tout faire pour que ca n'arrive pas ... et j'ai réussi ! Bien sûr, j'ai été fatiguée, mais en continuant quelques activités et en faisant très attention au régime sans sel et sans iode, j'ai réussi à ne rien prendre du tout, et en arrivant en médécine nucléaire, les médecins ont été surpris de ma "forme" (bon, ils ne me connaissaient pas avant ...) !
Bon courage et à bientôt !
Beate
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Beate
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Message: (p9199)
Posté le: 12. Nov 2004, 23:52
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Bonsoir Eglantine,
tu fais bien de mentionner le sujet des arrêts de travail - je n'ai pas pensé en parler !
Moi, je me suis toujours fait arrêter la dernière semaine AVANT la cure ou la scintigraphie, en allant voir mon médecin traitant, qui m'a signé l'arrêt de travail sans le moindre problème (certains auront peut-être besoin de s'arrêter un peu plus tôt, environ 15 jours avant la cure).
Avant de quitter l'hôpital, mon médecin nucléaire m'établissait ensuite un arrêt de travail "de prolongation" de 3 ou 4 semaines - et je pense que c'est un minimum pour recupérer ! Comme mes sevrages ont toujours eu lieu en été, j'y rajoutais ensuite mes congés annuels, environ 4 semaines de plus, donc au total chaque été j'étais arrêtée pendant 2 mois et demi.
Dans certains hôpitaux (heureusement plutôt rares !), on a tendance à vouloir "faire faire des économies à la sécu" : pour pouvoir remettre les gens au travail très rapidement, on les "dope" au Cynomel à haute dose pendant quelques jours, en sortant de cure (75 µg par jour, c'est beaucoup !), et on leur donne juste 2 ou 3 jours d'arrêt ! D'après les quelques témoignages réçus dans le forum, c'est très dur à vivre, et je ne le recommande à personne (d'ailleurs, autant de T3 d'un coup peut être très dangéreux pour le coeur).
Le lévothyrox, qu'on reprend dès qu'on a passé la scintigraphie (le plus souvent progressivement, en augmentant sur quelques jours) ne fait effet que progressivement (il lui faut au moins 6 semaines pour agir complètement, surtout en sortant d'une grosse hypo) - et donc, je pense qu'un arrêt de 4 semaines, le temps de "sortir du trou" de l'hypo, est entièrement justifié, il ne faut vraiment pas avoir mauvaise conscience, car même un "bon cancer" reste un cancer, dont il faut se remettre, et une gelule radioactive, ce n'est pas un bonbon !
Concernant les arrêts de travail, quand on est en France, il faut penser à faire cocher la case "en rapport avec une affectation longue durée" - ainsi, les indemnités journalières reçues pendant cette période ne seront pas imposables (il n'y a pas de petites économies ...) !
A bientôt !
Beate |
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