Beate
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Message: (p215881)
Posté le: 18. Sep 2009, 20:59
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Bonjour,
je viens de trouver un article intéressant, un peu scientifique ... et normalement, seulement accessible aux médecins, ou en payant, mais j'ai réussi à le recopier des archives de Google. Cela ne respecte pas le copyright, je sais ... mais je pense que cet article pourrait être très intéressant pour les patients concernés !
Beate
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Quel traitement du carcinome médullaire de la thyroïde en 2009?
22/05/2009
La chirurgie est le seul traitement de première intention permettant de guérir les patients avec un carcinome médullaire. La survie dépend de la qualité de cette chirurgie initiale et doit par conséquent être confiée à un chirurgien expérimenté ( Rendl G, et al. Clin Endocrinol (Oxf) 2008 ).
En pratique clinique courante, trois situations préopératoires peuvent se présenter en fonction de l'extension locale ou à distance du carcinome médullaire de la thyroïde (CMT):
Le CMT est localisé sans envahissement ganglionnaire évident à l'échographie cervicale, sans métastases à distance avec le plus souvent une calcitonine inférieure à 500 pg/ml
La chirurgie consistera alors en une thyroïdectomie totale associée à un curage récurrentiel bilatéral et à un curage latéral (jugulocarotidien et spinal) homo ou bilatéral. La thyroïdectomie doit être totale car 30% des CMT sporadiques peuvent être bilatéraux.
Le curage ganglionnaire est indispensable de première intention puisque 40 à 75% des patients ont un envahissement ganglionnaire lors du diagnostic, même pour les CMT de petite taille (voir : Gulben K, et al. World J of Surg 2006; 30: 84-90 ) - (voir : Beressi N, et al. Thyroid 1998; 8: 1 039-44 ) .
Outre le curage récurrentiel bilatéral, un curage latéral au minimum homolatéral doit être réalisé y compris chez les patients sans ganglions récurrentiels envahis (voir : Machens A, et al. British J of Ssurg 2008; 95: 586-91 ) . Le caractère homo ou bilatéral du curage latéral dépendra des caractéristiques cliniques du CMT et de la présence d'une mutation du gène RET. Ainsi, sera réalisé un curage latéro-cervical bilatéral systématique lorsque le CMT est bilatéral, en cas de lésion ganglionnaire controlatérale suspecte en préopératoire, en cas d'envahissement ganglionnaire récurrentiel massif (>10 ganglions) ou lorsque le gène RET est muté.
Le CMT est localisé mais il existe un envahissement ganglionnaire cervical massif en préopératoire sans métastases à distance
La probabilité de guérison après la chirurgie dépend de l'importance de l'envahissement ganglionnaire initial (voir : Machens A, et al l. JCEM 2005; 90: 2 029-34 ) , (voir : Scollo C, et al. JCEM 2003; 88: 2 070-5 ) , (voir : Machens A, et al. Cancer 2000; 88: 1909-2015 ) . Les patients ayant un niveau de calcitonine très élevé et/ ou une échographie préopératoire en faveur d'un envahissement ganglionnaire massif ont ainsi une probabilité de guérison postopératoire faible. Doit on, dans ces circonstances, leur proposer un curage ganglionnaire extensif avec le risque hypoparathyroidien ou récurrentiel que ce geste comporte?
Aucune étude prospective, randomisée ne permet aujourd'hui de répondre à cette question. Seuls quelques éléments de réponse peuvent donc être apportés. Il est tout d'abord important de rappeler que le risque d'hypoparathyroidie ou de paralysie récurrentielle définitive est faible lors d'une première chirurgie thyroïdienne si le geste est réalisé par un chirurgien expérimenté (inférieur à 1 ou 2%). Par ailleurs, chez les patients présentant un CMT avec un envahissement ganglionnaire massif mais sans métastases à distance, la probabilité de guérison après une chirurgie complète est certes faible mais non nulle. La plupart des équipes continuent donc à proposer chez les patients avec un CMT localisé sans métastases à distance, une thyroïdectomie totale associée à un curage ganglionnaire extensif en première intention ( (voir : Evans DB, et al. Seminars in surgical oncology 1999; 16 h 50-63 ) , (voir : Jimenez C, et al. Endocrinol Metab Clin North Am 2008; 37: 481-96 ) ).
Le CMT est métastatique à distance
Des métastases à distance sont initialement retrouvées chez 7 à 23% des patients (voir : Gulben K, et al. World J of Surg 2006; 30: 84-90 ) (voir : Schlumberger M, et al. Nat Clin Pract 2008; 4 h 22-32 ) . L'objectif de la chirurgie cervicale est alors palliative. La chirurgie cervicale permettra d'éviter la morbi/mortalité potentiellement générée par l'envahissement tumoral des voies aérodigestives. Un curage ganglionnaire extensif n'est donc pas indiqué. On proposera par contre à ces patients une thyroidectomie totale associée à une résection de toutes les lésions ganglionnaires macroscopiquement visibles (voir : Evans DB, et al. Seminars in surgical oncology 1999; 16 h 50-63 ) , (voir : Jimenez C, et al. Endocrinol Metab Clin North Am 2008; 37: 481-96 ) ).Bien évidemment cette chirurgie devra tenir compte de l'état général du patient.
LES POINTS FORTS
La probabilité de guérison après la chirurgie dépend de l'importance de l'envahissement ganglionnaire initial. La plupart des équipes continuent à proposer chez les patients avec un CMT localisé sans métastases à distance, une thyroïdectomie totale associée à un curage ganglionnaire extensif en première intention, malgré le risque d'hypopathyroïdie ou récurrentiel.
Que proposer à un patient non guéri par la chirurgie?
Qui traiter?
Le temps de doublement de l'ACE et de la calcitonine est un outil de décision thérapeutique
L'évolution tumorale des CMT non guéris par la chirurgie est très variable. Certains patients ont une évolution tumorale rapide alors que d'autres peuvent vivre de nombreuses années dans d'excellentes conditions, y compris au stade métastatique. Il est donc primordial avant de proposer un traitement de différencier deux groupes de patients: ceux ayant une maladie rapidement progressive qu'il va falloir traiter rapidement et de façon agressive et les patients ayant une maladie d'évolution beaucoup plus lente pour qui le rapport bénéfice/risque de chaque traitement doit être soigneusement évalué et qui peuvent, dans certains cas, bénéficier d'une simple surveillance.
Le paramètre le plus intéressant pour différencier ces deux groupes de patients, outre la comparaison du bilan d'imagerie à 6 mois d'intervalle, pourrait être le temps de doublement de la calcitonine et de l'ACE.
Ce temps de doublement serait en effet un paramètre fi able permettant d'évaluer l'évolutivité tumorale dans la mesure où il est corrélé à la survie (voir : Barbet J, et al. JCEM 2005; 90: 6 077-84 ) , (voir : Miyauchi A, et al. Ann of Surg 1984; 199: 461-6 ) .
Comment traiter?
Il existe peu d'études prospectives évaluant les possibilités thérapeutiques dans les CMT non guéris chirurgicalement. De plus, les quelques études prospectives publiées n'incluaient qu'un nombre limité de patients. Enfin l'évolutivité de la maladie résiduelle avant l'instauration du traitement n'est que rarement déterminée. Les conclusions de ces études doivent donc être interprétées de façon prudente.
La chirurgie cervicale
Lorsque la maladie résiduelle est localisée dans le cou ou le médias- tin, une deuxième chirurgie permet le plus souvent l'exérèse de tissus néoplasiques. Cette exérèse est cependant le plus souvent incomplète et la guérison post opératoire n'est obtenue sur le long terme que chez 5 à 35% des patients (voir :Giraudet AL?,et Al,KEM 2007.92:4185-90) (voir :Kebebew E,etal Arch Surg 2000;135:895-901) . Aucun paramètre fi able ne permet de prédire quel patient sera guéri par cette deuxième chirurgie (voir : Fialkowski E, et al. World J of Surg 2008; 32: 754-65 ) ). L'indication opératoire doit donc être posée avec précaution d'autant plus que les complications post-opératoires sont plus fréquentes lors de ces secondes chirurgies (voir : Gimm O, et al. World J of Surg 1998; 22: 562-567; discussion 567-8 ) - (voir : Yen T W, et al. Surgery 2003; 134: 890-899; discussion 899-901 ) .
La chirurgie des métastases
Si des métastases à distance sont présentes, la reprise chirurgicale cervicale n'est pas indiquée. Par contre, une chirurgie palliative des métastases est recommandée par certains (voir : Chen H, et al. Ann of surg 1998; 227: 887-95 ) . L'évolution de la plupart des CMT est en effet lente même au stade métastatique. Cette chirurgie palliative permettrait d'améliorer la qualité de vie des patients en diminuant la symptomatologie (flushs, diarrhées, douleurs...) voire même d'améliorer la survie au prix d'une faible morbidité (voir : . Rendl G, et al. Clin Endocrinol (Oxf) 2008 ) (voir : (voir : . Chen H, et al. Ann of surg 1998; 227: 887-95 ) . ) .
La radiothérapie externe, un outil pour diminuer la récidive locale
Chez les patients inopérables car présentant un CMT localement inextirpable, la radiothérapie externe cervicale et médiastinale permet de retarder l'évolution locale et permet donc de retarder ou d'éviter un décès par compression des voies aériennes.
Chez les patients présentant une élévation de la calcitonine plasmatique postopératoire malgré une chirurgie complète, la radiothérapie permet également de diminuer par 2 à 4 le risque de récidive cervicale (voir : Fersht N, et al. Thyroid 2001; 11: 1 161-68 ) . Elle ne permet cependant pas d'allonger la survie (voir : Brierley J, et al. Thyroid 1996; 6: 305-10 ) , (voir : van Heerden JA, Grant DM. Ann of surg 1990; 212: 395- 400; discussion 400-391 ) . Par ailleurs, l'inconvénient majeur de la radiothérapie est de rendre très difficile une éventuelle chirurgie cervicale ultérieure.
La chimioembolisation hépatique?: à réserver aux patients avec un envahissement hépatique modéré
La chimioembolisation des métastases hépatiques permet une régression ou une stabilisation des métastases hépatiques chez 60% des patients avec cependant un échappement rapide après quelques mois (voir : Lorenz K, et al. Surgery 2005; 138: 986-93; discussion 993 ) . Elle ne semble par ailleurs efficace qu'à un stade précoce de la maladie, chez les patients ayant un envahissement hépatique de moins de 30% (voir : Fromigue J, et al. JCEM 2006; 91: 2 496-9 ) .
Les analogues de la somatostatine, une efficacité qui n'a jamais été démontrée
Les analogues de la somatostatine ne doivent pas être utilisés en pratique courante dans le traitement du CMT que ce soit à visée anti-tumorale ou anti-diarrhéique. Ils n'ont en effet jamais prouvé une quelconque efficacité (voir : Modigliani E, et al. Clin Endocrinol (Oxf) 1992; 36: 183-186 ) , (voir : Vitale G, et al. JCEM 2000; 85: 983-8 ) .
La radio-immunothérapie à réserver aux patients ayant des masses tumorales modérées
La radio-immunothérapie repose sur l'utilisation d'anticorps anti-ACE marqués à l'iode 131 capables de détruire spécifiquement les cellules tumorales des CMT. L'intérêt de la radioimmuno- thérapie a été étudié dans des petites séries ayant inclus au maximum 30 patients porteurs d'un CMT métastatique suivis en moyenne pendant 12 à 121 mois (voir : Juweid ME, et al. Cancer 1999; 85: 1 828-42 ) - (voir : Kraeber-Bodere F, et al. J Nucl Med 2006; 47: 247-55 ) . Ce traitement a permis une régression tumorale partielle chez 7 à 29% des patients et une stabilisation tumorale chez 35 à 73% des patients. L'intérêt d'un tel traitement sur la survie des patients n'a cependant été prouvé que pour les CMT évolutifs, c'est à dire ayant un temps de doublement de la calcitonine inférieur à 2 ans (voir : Chatal J, et al. J Clin Oncol 2006; 24: 1 705-11 ) . Par ailleurs ce traitement semble peu efficace chez les patients présentant de grosses masses tumorales.
La chimiothérapie systémique par adriamycine
La chimiothérapie systémique, avec en particulier l'adriamyine, permet une réponse tumorale partielle et transitoire chez moins de 20% des patients sans amélioration de la survie.
Les inhibiteurs des tyrosines kinases, des résultats préliminaires d'études de phase II
Les inhibiteurs de tyrosine kinase disponibles à ce jour dans le CMT inhibent non seulement la tyrosine kinase du RET mais également la tyrosine kinase des récepteurs du VEGF (vascular endothelial growth factor), de l'EGF (epidermal growth factor), du FGF (fi broblast growth factor), du PDGF (platelet- derived growth factor receptor) permettant ainsi non seulement une action anti-tumorale mais également anti-angiogénique.
Les données disponibles à ce jour avec les différents agents utilisés ne sont que préliminaires, issus de phases II et n'ont pour l'instant été rapportées que sous formes d'abstracts.
Elles doivent donc être interprétés avec précaution. Les deux inhibiteurs des tyrosines kinases semblant les plus intéressants à ce jour dans le CMT sont le vandetanib et le motesanib diphosphate.
Le vandetanib (ZD6474) inhibe la tyrosine kinase non mutée ainsi que la plupart des formes mutées du gène RET (excepté la mutation Val 804) ainsi que la tyrosine kinase des récepteurs du VEGF et de l'EGF. Il est donné en une prise orale quotidienne à la dose de 300 mg/jour (voir : Holden SN, et al. Ann Oncol 200 516: 1 391-7 ) , (voir : Tamura T, et al. J Thorac Oncol 2006; 1: 1 002-9 ) .
Les résultats d'une étude internationale de phase II randomisée contre placebo ayant inclus des patients avec un CMT métastatique sont attendus courant 2009. Il a cependant été rapporté au congrès de l'European Thyroid Association en 2008, une étude pilote ayant utilisé le vandetanib 300 mg en une prise quotidienne chez 30 patients porteurs d'un CMT familial, métastatique pendant 571 jours (voir : Wells AS, et al. In: 33rd Annual Meeting of the European Association. Thessaloniki, Greece 2008 ) .Une réponse tumorale partielle était obtenue chez 17% des patients alors que 73% avaient une stabilité tumorale. A noter cependant que dans cette étude une progression tumorale n'était pas un prérequis avant l'inclusion ce qui rend la notion de stabilisation tumorale ininterprétable. Des effets secondaires modérés de grade I ou II étaient retrouvés chez plus de 80% des patients à type de rashs cutané, d'une asthénie, de troubles digestifs et d'un allongement asymptomatique du QT.
Le motesanib diphosphate (AMG 706) est un inhibiteur des tyrosines kinases du VEGF, du PDGF et KIT et du RET. Il peut être utilisé en une prise orale 3 semaines sur 4. 83 patients présentant des CMT sporadiques ou familiaux ont été inclus dans une étude de phase II et traités par du motesanib (voir : Schlumberger M, et al. In: 89 th Annual Meeting of the endocrine society (Endo 07). Toronto 2007 ) . 2% de ces patients avaient une réponse partielle alors que 52% avaient une maladie stable pendant plus de 6 mois.
A noter cependant, que comme précédemment, la progression tumorale n'était pas un prérequis indispensable avant l'instauration du traitement. Chez ces patients la tolérance semblait bonne lorsque la dose était inférieure à 125 mg/jour.
Hypothyroïdie chez les patients traités par inhibiteurs de tyrosine kinase
Vingt à 60% des patients traités par inhibiteurs de tyrosine kinase développent une hypothyroïdie (voir : Mannavola D, et al. JCEM, 2007; 92: 3 531-4 ) - (voir : Sherman SI, et al. NEJM 2008; 359: 31-42 ) . L'hypothyroïdie est le plus souvent fruste au début du traitement mais s'aggrave ensuite progressivement pouvant à l'extrême se compliquer d'un coma myxoedémateux (36). Une surveillance mensuelle de la TSH est donc conseillée chez tous les patients traités par inhibiteurs des tyrosines kinases.
Parallèlement, chez les patients poursuivant une substitution thyroïdienne préalablement au traitement par inhibiteurs des tyrosines kinases, il est nécessaire d'augmenter la posologie de levothyroxine de 30% en moyenne (voir : Sherman S, et al. In: 89 th Annual Meeting of the Endocrine Society, Toronto 2007 ) . La physiopathologique de cet hypothyroïdie reste mal connue.
Les traitements symptomatiques, une arme thérapeutique indispensable
Certains patients porteurs de CMT métastatiques évoluent très lentement et présentent donc de longues durées de vie. Il est donc primordial tout au long du suivi du patient de se poser la question de l'intérêt d'un traitement symptomatique afin d'améliorer la qualité de vie. Ainsi les diarrhées peuvent être améliorées par le lopéramide et/ou la codéine. La chimioembolisation hépatique peut permettre de diminuer la diarrhée lorsque l'envahissement hépatique prédomine. Inversement, les analogues de la somatostatine et l'interferon alfa ne sont qu'exceptionnellement efficaces sur les diarrhées (voir : Modigliani E, et al 1992. Clin Endocrinol 36: 183-6 ) . Les douleurs et les fractures entraînées par les métastases osseuses peuvent être traitées par chirurgie, radiothérapie externe, embolisation ou cimentoplastie. Des injections intra-veineuses de biphosphonates pourraient également avoir un intérêt sur les métastases osseuses lytiques bien qu'aucune étude n'ait été réalisée jusqu'à présent dans le CMT.
En conclusion, un traitement chirurgical complet avec curage récurrentiel bilatéral et jugulocarotidien homo ou bilatéral, réalisé par un chirurgien expérimenté reste et restera probablement pendant encore plusieurs années le seul traitement curateur du CMT. En seconde intention, les inhibiteurs des tyrosines kinase semblent prometteurs bien que non dénués d'effets secondaires. Les résultats des études randomisées de phase II utilisant ces inhibiteurs de tyrosine kinase sont attendus avec impatience. En attendant ces résultats et une éventuelle autorisation de mise sur le marché dans l'indication du CMT métastatique, les inhibiteurs de tyrosine kinase ne peuvent pas, à ce jour, être prescrits dans le CMT en dehors d'études cliniques.
Dr Delphine VEZZOCI |
Article paru dans Abstract Diabétologie N° 34, Avril 2009, publié sur impact-sante.fr : http://www.impact-sante.fr/Medecine....._thyroide_en_2009/16/7638 |
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